Par Maguet Delva
J’ai pu écouter enfin à environ 10 reprises les seize chansons qui composent le nouvel album du groupe Zafem, mené par le tandem composé de l’excellent compositeur Dener Ceide et de l’une des plus belles voix haïtiennes, Reginald Cange. C’est du lourd, du très lourd. Ceux qui ont gâté ces dernières années les mélomanes haïtiens et le public du même nom avec des chansons sirupeuses et des petits refrains plus que mineurs, le Roi Dener Ceide vient de faire sa rentrée donnant un coup de pied dans la fourmilière et c’est salvateur pour la survie de notre compas. Le travail qui est fait est remarquable. Il l’est d’autant plus qu’une poésie sociale parcourt les chansons avec d’autant plus de métaphores que Monsieur Ceide a besoin de peu pour en construire et pour embraser nos mémoires avec autant de mélodies.
Un vent nouveau vient de souffler sur le Compas et ce n’est pas n’importe quel vent, il est logé dans le nouvel album du groupe Zafem de Dener Ceide en tandem avec l’une des plus belles voix haïtiennes en la personne de Monsieur Reginald Cange. Ce tandem va avoir le même impact que celui de Richie et Pipo du groupe Klass. En passant nous devons être plus réactifs quand des saltimbanques sans talents attaquent de manière grossière et inutile des créateurs hors pairs comme Richie, Arly Larivière Gazzman Couleur, qui constituent éléments importants de notre patrimoine intellectuel en matière de création musicale
Sur cette pente l’album du groupe musical Zafem mérite que l’on en parle car seize chansons avec des messages societaux qui en disent long sur la capacité de nos compatriotes musiciens à observer notre société en déroute. On connaît les forces de frappe du poète Dener Ceide depuis cette magistrale composition qui avait largement contribué à établir la légende de Tabou Combo « Lagem poum ale », sans oublier ce petit bijou poétique qui nous a fait vaciller en bon terme « Lajan sere » qui avait largement contribué à installer Klass dans le paysage musical haïtien. Cette fois le génie haïtien se met à son compte et nous a mis devant seize petits bijoux confectionnés avec des métaphores poétiques qui séduisent. C’est salutaire par les temps qui courent où les réseaux sociaux tendent à tirer vers le bas la création musicale avec des têtes fêlées qui jappent sans arrêt sur le net contre ceux de nos compatriotes qui créent donnant une image positive de leur pays.
La première musique de cet album est un poème sociétal avec une description grandiose des maux de notre société. C’est ce que l’on peut appeler un « poème monde » avec des images musicales somptueuses. Le poète Dener Ceide n’est pas n’importe quel poète, il sait comment arranger ses mots pour mettre sur nos maux avec finesse tout en nous délivrant une vérité poétique sur la marche du monde. « LAlin ak soley » est avant tout une sarabande de paroles juxtaposées avec des images métaphoriques tout en respectant les règles de la sonorité musicale. L’homme au turban a encore frappé et tant mieux pour nous. Il nous prend par les épaules et nous dépose dans une boîte à musique où la médiocrité n’existe pas:
« Solèy la di fò l leve
Li douvanjou
L’alun Lan di li sou pran
plezil Toujou ».
Avec cet album, le roi de la composition haïtienne vient encore une fois de mettre la barre très haute. Fini, les chansons à des petits couplets miséreux sans réflexion. Le magicien Ceide nous sert un plat délicieux ou tous les ingrédients de la bonne cuisine musicale sont réunis.
Les salves poétiques musicales de notre compatriote sont neuves et ressemblent à des embouchures de la Grande Anse en furie musicalement. Un autre petit bijou social avec un tempo de plus, le message essentiel de la chanson s’adresse à qui a une amoureuse transi rester au pays ou au pays lui même. Je dirai les deux mon capitaine. S’agit- il d’une femme ou notre pays? Le mystère poétique reste entier; l’essentiel est que la magie des mots sur nos maux que Ceide transforme en messages est délivrée dans nos labyrinthes de peuple meurtri.